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ABUS DE BIENS SOCIAUX SELON LE DROIT MALAGASY
DISPOSITION GENERALE
Cadre juridique :
Loi n 2003-036 du sur les Sociétés Commerciales dans les articles 931 à
Le Code Pénal malgache du 31 mai 2005
Le Code de Procédure Pénale malgache
Le Code de Commerce

Définition

Le Juridictionnaire a donné la définition suivante de L’abus de biens sociaux (ou abus de bien social) : « Il s’entend de l’usage frauduleux des biens qui appartiennent à une société. Il intéresse le cas de détournement de mauvaise foi de biens meubles ou immeubles par des dirigeants au préjudice des associés, de détournement de crédit de la société ou de détournement de leurs pouvoirs sociaux pour en faire un usage contraire à l’intérêt social, à des fins personnelles ou à seule fin de favoriser une autre société dans laquelle ils possèdent un intérêt. Il s’agit là d’une forme de malversation ou de dissipation frauduleuse. »

LES ELEMENTS CONSTITUTIFS DU DELIT

Elément légal

L’infraction d’abus de biens sociaux est décrite dans le code des Sociétés (Loi n 2003-036 ) , dans l’ article 931 de la manière suivante : « – Seront punis d’une amende de vingt cinq (25) millions ou cinq millions ariary à deux cent (200) millions de FMG ou quarante millions ariary et de deux mois à deux ans d’emprisonnement ou de l’une de ces deux peines seulement, le gérant de la société à responsabilité limitée, les administrateurs, le président directeur général, le directeur général, l’administrateur général ou l’administrateur général adjoint qui, de mauvaise foi, font des biens ou du crédit de la société, un usage qu’ils savaient contraire à l’intérêt de celle-ci, à des fins personnelles, matérielles ou morales, ou pour favoriser une autre personne morale dans laquelle ils étaient intéressés, directement ou indirectement ».

Dans le cadre du Droit Pénal des Affaires, il s’agit de délit punissable commis par une catégorie bien précise de personnes comme : le gérant de la société à responsabilité limitée, les administrateurs, le président directeur général, le directeur général, l’administrateur général ou l’administrateur général adjoint pour deux formes de société : la SARL et la S.A.

Alors que le Code Pénal de 2005 qui parle de l’Abus de Confiance est plus vaste et pourra toucher beaucoup de personnes qui auront commis le délit mais qui reste aussi applicable, par extension, pour une bonne appréciation de l’infraction d’abus de biens sociaux.

En effet, le Code Pénal dispose dans son Art. 408 que: «  – Quiconque aura détourné ou dissipé au préjudice des propriétaires, possesseurs ou détenteurs, des effets, deniers, marchandises, billets, quittances ou tous autres écrits contenant ou opérant obligation ou décharge, qui ne lui auraient été remis qu’à titre de louage, de dépôt, de mandat, de nantissement, de prêt à usage, ou pour un travail salarié ou non salarié, à la charge de les rendre ou représenter, ou d’en faire un usage ou un emploi déterminé, sera puni des peines portées en l’article 406. »

Elément moral du délit

Pour une bonne compréhension de l’acte, la notion d’usage abusif mérite d’être approfondie.

L’usage abusif est l’usage contraire à l’intérêt social. Il peut résulter d’actes positifs, tels l’appropriation ou la dissipation de biens sociaux mais également, comme l’a admis la Cour de cassation française, d’une omission d’agir.

C’est le cas dans lequel un dirigeant social s’abstient intentionnellement de réclamer à une autre société, dans laquelle il a des intérêts, le paiement deslivraisons effectuées.

Une jurisprudence récente a été sortie de manière à condamner le Gérant d’une SARL, au motif que la deuxième société de celui-ci, qui est basée en France , aurait bénéficié de plusieurs transferts d’argent .

Deux éléments caractérisent le délit :

  • Un usage abusif à des fins personnelles directes ou indirectes
  • La mauvaise foi

Un usage abusif à des fins personnelles directes ou indirectes.

La loi a voulu réprimer le dirigeant agissant par cupidité en mettant pour condition de sa culpabilité le fait qu’il ait agi « à des fins personnelles ou pour favoriser une autre personne morale ou entreprise dans laquelle il était intéressé directement ou indirectement ».

C’est par exemple le cas d’école du dirigeant d’une société de construction qui est également propriétaire d’une usine de brique et qui fournit celles-ci au prix fort à sa société.

De plus la jurisprudence a élargi la notion d’intérêt personnel qui ne doit pas être entendu dans un sens purement patrimonial : les ambitions politiques du dirigeant candidat à une élection qui utilise la structure sociale pour soutenir sa candidature, ou la simple volonté d’être agréable à une (ou un) ami(e) peut suffire à mettre au jour l’intérêt personnel visé par le texte.

La mauvaise foi

La loi subordonne la culpabilité du prévenu à sa « mauvaise foi ». Le dirigeant de mauvaise foi est celui qui a conscience du caractère abusif de l’acte qu’il commet, à savoir un usage à des fins personnelles et contraires à l’intérêt social d’un bien de la société.

Cependant, cet élément est apprécié de manière sévère par les tribunaux.

En effet, pour les juges, le dirigeant social est supposé apprécier la portée de ses décisions et le fait d’alléguer son inaptitude, attestée par les actes délictueux commis, est un moyen de défense le plus souvent voué à l’échec.

La mauvaise foi est souvent établie à partir des actes réalisés pour masquer les abus : tenue irrégulière de comptabilité, non convocation des assemblées etc.

Elément matériel

Mr RAKOTOMANANA Honoré, auteur du livre « Le Droit Pénal Malagasy des Affaires » a bien spécifié que « cet élément matériel est double : il faut, d’une part, que les dirigeants aient fait usage des biens ou du crédit de la société et, d’autre part, qu’il s’agisse d’un usage contraire à l’intérêt social.»

Usage des biens ou du crédit de la société.

La loi protège expressément les biens sociaux entendus de manière large comme tous ses actifs (fonds, créances, meubles et immeubles) mais également son crédit entendu comme sa capacité d’emprunter.

Le principe est simple : il faut et il suffit qu’il y ait usage des biens de la Société (meubles ou immeubles) ou du crédit de celle-ci c’est-à-dire engager la signature sociale soit sous forme de caution, et bien d’autres formes d’obligation ou d’actes constitutifs de droit réel.

Usage contraire à l’intérêt social

Ce qu’il faut surtout retenir, à travers cet élément, c’est l’usage des biens à des fins personnelles, matérielles ou morales, ou pour favoriser une autre société ou entreprise dans laquelle il est intéressé directement ou indirectement.

Toutefois, le législateur malagasy n’a pas voulu développer deux aspects fondamentaux de cet élément qui sont Les actes sans aucune contrepartie et L’action civile.

De manière générale, les actes contraires à l’intérêt social se divisent en deux catégories :

Les actes sans aucune contrepartie

Première hypothèse : le dirigeant social fait réaliser par la société des actes dont la nature peut être très variée (cautionnement, cession, dons, acquisition, prêt etc.) mais qui ne peuvent trouver aucune justification économique.

Deuxième hypothèse : Les actes faisant courir à la société un risque disproportionné

Ces actes ont une contrepartie prévisible mais font courir à la société un risque disproportionné. Un dirigeant qui conclut pour sa société une affaire excédant ses capacités ou pouvant de manière prévisible remettre en cause son existence commet le délit.

En fait la qualification d’abus des biens ou du crédit de la société requiert des juges une grande réflexion, en vertu des préceptes généraux de justice et notamment des principes d’équités avant de prononcer une décision quelconque.

La même jurisprudence1 ci-dessus citée a, à mainte reprise, fait couler beaucoup d’encre car le droit de la défense a été dans cette affaire ignoré sciemment. Conséquence prévisible de cette affaire : application des peines prévues par l’art 931 de la Loi n 2003-036, avec des Dommages-Intérêts au profit intégralement du demandeur partie civile (associé à concurrence de 20% du Capital Social).

Un acte de disposition n’est nullement nécessaire pas plus qu’un acte de détournement, un simple acte d’administration peut suffire, comme donner à bail un immeuble social pour un montant dérisoire par exemple.

Une signature donnée au nom de la société par le dirigeant peut constituer l’infraction lorsqu’elle est apposée sur un effet de commerce étranger à l’activité sociale, un cautionnement injustifié ou, de manière générale, sur tout acte de nature à faire peser sur la société le risque d’une perte ou d’un appauvrissement sans contrepartie.

L’ACTION CIVILE

L’action civile est l’action en réparation d’une victime d’un préjudice issu ou non

d’une infraction pénale. Elle peut être exercée devant les juridictions civiles ou

pénales.

L’action civile existe lorsque l’infraction a porté atteinte à un intérêt privé

conjointement à l’atteinte à l’ordre public. L’action civile peut donc se faire à côté de l’action publique.

Les conditions générales à l’action en justice

Comme pour toute action en justice, l’action civile nécessite que le requérant

ait la capacité juridique et un intérêt à agir.

Les conditions spéciales à l’action civile

L’infraction à l’origine du dommage

Les conditions d’exercice

Il faut en principe qu’il y ait une infraction punissable pénalement à l’origine du

dommage. Il faut donc que l’action publique soit recevable pour que l’action

civile puisse aboutir.

L’existence d’un dommage

L’existence d’un dommage est une condition de recevabilité de l’action civile. La nature du dommage est indifférente dès lors que celui-ci est certain et actuel (dommage physique, préjudice économique, matériel, moral…).De plus, selon l’article 2 du CPP Français, le dommage doit être personnel, c’est-à-dire que l’intéressé doit avoir personnellement souffert des faits objets de la poursuite. En outre, le lien de causalité doit être direct. En d’autres termes, le dommage doit résulter directement de l’infraction poursuivie.

Le Code de Procédure Pénale Malagasy est assez précis sur point en son article premier alinéa 2 : Cette action peut aussi être mise en mouvement par la partie lésée dans les conditions déterminées par le présent Code.

 

Le caractère du dommage est apprécié au cas par cas par les juges. Ils l’admettent toujours dès lors que le dommage est un élément constitutif de l’infraction. Ils l’ont également admis dans certains cas pour des infractions formelles ainsi que pour des infractions d’intérêt général.

Les exceptions

La constitution de partie civile est l’acte de procédure par lequel la victime

manifeste sa volonté d’agir devant les juridictions pénales pour obtenir la

reconnaissance de culpabilité de l’auteur et des dommages-intérêts.

Conclusion :

La jurisprudence citée en question est très intéressante car :

  • Il n’y a pas eu respect du droit de la défense dans le jugement du TPI
  • Les juges du TPI ont rejeté le vice de forme soulevé par le défendeur compte tenu d’un Soit Transmis fait par le PGCA pour démarrer l’enquête
  • Le début du procès jusq’à la sortie de l’arrêt confirmatif et du rejet du Pourvoi dans l’intérêt de la Loi fait par le défendeur a été fait durant une très courte période, alors qu’il n’y a pas de caractère urgent. Deux ans au total
  • La décision confirmative des Dommages-intérêts n’est pas motivée
  • Les juges du TPI ont retenu qu’il y a eu usage de fausse lettres et factures alors que par principe, le faux n’est qualifié que s’il y a des préjudices subis par la victime de l’usage de la pièce (CISCO)
  • La partie civile, en l’occurrence M RANARISON Tsilavo, n’est autre qu’un ex Directeur de Connectic et associé à hauteur de 20%. Quid de la part des Dommages-intérêts revenant à la société Connectic ?